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Janos Urban

(Szeged, 1934 – Lausanne, 2016)

Arrivé en Suisse de sa Hongrie natale en 1956 comme réfugié politique, Janos Urban poursuit sa formation d’artiste commencée à Budapest à l’École cantonale des beaux-arts à Lausanne, où il enseigne dès 1964, parallèlement à son activité artistique. Pionnier de l’art conceptuel en Suisse, Janos Urban explore, à partir de 1967, de nouveaux matériaux comme le phosphore et le plexiglas pour donner forme à ses recherches sur les phénomènes optiques et sur les questions de perception et de durée.

Biographie

Après sa maturité à l’École secondaire des beaux-arts et des arts appliqués à Budapest, Janos Urban étudie l’histoire de l’art de 1953 à 1956, année de son exil en Suisse comme réfugié politique à cause de la répression militaire soviétique. Dès lors apatride, il poursuit sa formation d’artiste auprès de Jaques Berger à l’École cantonale des beaux-arts à Lausanne et obtient son diplôme en 1961. Cette même année, il est admis à la Société des peintres, sculpteurs et architectes suisses (SPSAS) et expose pour la première fois à la galerie l’Entracte, qui présentera son travail à plusieurs reprises. Il découvre l’Europe de l’Ouest et effectue des séjours à Paris et en Espagne notamment. En 1963, il épouse l’artiste Jacqueline Nicod et commence à enseigner à l’École cantonale d’art à Lausanne. Il expose, entre autres, à la galerie Palette à Zurich en 1970, à la galerie Impact à Lausanne en 1972 et au Centre d’art contemporain Simon I. Patiño à Genève en 1974, sans compter les expositions personnelles à Hildesheim, Brescia et Modène et les multiples participations à des collectives en Europe et, bientôt, dans le monde entier. En 1974, il reçoit le prix de la fondation Landis & Gyr. En 1977, il obtient la nationalité suisse. En 1984, Urban est affecté par une maladie psychique qui le tiendra éloigné de son atelier pendant dix ans. Ce n’est qu’en 1994 qu’il reprendra son travail.

Après avoir expérimenté, durant ses années de formation, le naturalisme poétique et le surréalisme de l’école hongroise à Budapest, Urban pratique, à Lausanne, un expressionnisme abstrait tantôt monochrome tantôt coloré avec des effets de matière inspirés d’Antoni Tàpies. Dès 1963, la trace, l’empreinte inassignable s’affirme en reliefs et en creux sur la toile modelée à l’aide d’une imprégnation au polyvinynile, comme dans Peinture (1966). Dès 1967, ses tableaux deviennent de véritables installations ou environnements qui questionnent les phénomènes optiques; ils intègrent derrière un écran en plexiglas des éléments en polyester exploitant la luminescence du phosphore; ils sont parfois éclairés par un faisceau d’ultraviolets interceptant la silhouette du spectateur. L’artiste exploite progressivement tous les moyens techniques de transmission d’énergie et s’intéresse aux ondes électriques, électromagnétiques, infrarouges, solaires et cosmiques.

En 1970, Urban franchit le seuil de l’art conceptuel, dont il devient l’un des pionniers en Suisse. Des phénomènes purement optiques, il passe aux messages dont ils sont les supports. Selon son credo: «L’œuvre est ouverte. Elle ne connaît aucune limite, puisqu’elle résulte de l’interaction continue de l’espace et du temps», il réalise des montages vidéo et des travaux scripto-visuels en perpétuel devenir, à la manière du collectif d’artistes britanniques Art and Language. Par exemple, utilisant des moyens statistiques, linguistiques, graphiques et photographiques, il ouvre des dossiers documentaires, interrogeant, sur le mode du compte-rendu poétique, un lieu et ses habitants, comme les îles Lipari dans Approche des îles (1972), travail de groupe réalisé avec ses élèves, ou encore dans Erlebte Erdteile (1970-1974). Praxis (1976), recueil des travaux conceptuels qu’il a réalisés jusque-là, s’agence en une autobiographie comme appréhension des lieux et des temps par une conscience. L’artiste rend ici en quelque sorte sensible son propre voyage, à la fois extérieur et intérieur, dans son dialogue perpétuel avec le monde, tant sur le plan de la perception que sur celui de la pensée.

En 1984, alors que se manifestent des troubles de santé, Urban rompt avec l’art conceptuel et réalise une série de peintures élégiaques émouvantes centrées sur le thème de la Méditerranée et ses sites, qu’il ne montrera que onze ans plus tard. Après une décennie marquée par la maladie, il reprend une activité picturale au milieu des années 1990, imaginant des Nouveaux paysages sous forme de rencontres entre le conscient et l’inconscient. En l’an 2000, il s’attache à rendre ses impressions d’Égypte dans des aquarelles très colorées, pour s’intéresser ensuite au genre du portrait.